La cuisine du Témiscouata

Comme la Matapédia, le Témiscouata fait partie, administrativement parlant, du Bas-Saint-Laurent. Mais il en fait aussi partie au plan touristique, alors qu’aujourd’hui, la Matapédia est incorporée dans le grand tour de la Gaspésie. Une fois qu’on a dit cela, on se rend bien compte, dans les faits, que le Témiscouata a ses ressemblances et ses différences importantes avec le Bas-Saint-Laurent.

Le nord de la région, la partie la plus haute qui surplombe la côte du Bas-Saint-Laurent, appartient à la sapinière à bouleau jaune. C’est le pays des merises, du sureau rouge et des nombreux champignons amoureux des conifères. La partie la plus basse, orientée vers le sud, est  une érablière à bouleau jaune. C’est une organisation forestière qui ressemble à celle de la Matapédia. On y trouve beaucoup d’érables à épis ou de Pennsylvanie, des sorbiers, de la clintonie boréale ou de la salsepareille pour se faire du vin. Mais comme cette partie du territoire ne débouche pas sur la mer comme la Matapédia, elle est encore plus chaude en été. Le frère Marie-Victorin y fit jadis de belles découvertes botaniques. La région frontalière américaine possède l’un des climats les plus doux du Québec : on l’appelle parfois la petite Floride!

Son peuplement et ses ethnies fondatrices

Les Malécites considéraient le Témiscouata comme une partie de leur espace de vie. Mais le territoire avait été visité régulièrement par d’autres peuples avant eux. En effet, on a découvert en 1991, près de Squatec, un site archéologique datant de 11 000 ans! Et deux autres sites à Dégelis datant de 3 800 ans et 5 600 ans. De nombreux sites archéologiques démontrent que les Archaïques maritimes et les Archaïques laurentiens utilisaient la route du Portage pour traverser de l’Atlantique au fleuve Saint-Laurent pendant la période sylvicole, entre 2 400 AA et 1 000 AA. Ils venaient, entre autres, se chercher du chert (sorte de pierre) pour fabriquer leurs outils et leurs armes, près du lac Touladi. On a relevé aussi la présence des Iroquoiens, au site Davidson, du XI au XVI e siècle, de sorte qu’on a la preuve que ces derniers, qui habitaient la plaine du Saint-Laurent, faisaient des incursions fréquentes à l’intérieur des terres pour aller se faire des provisions, pendant l’été et l’automne. Curieusement cependant, on peut s’étonner de les voir là, étant donné qu’ils n’avaient pas une bonne relation avec les Toudaman qui habitaient justement le Bas-Saint-Laurent, selon Jacques Cartier. Des recherches futures nous permettront peut-être de répondre à cette question. 

Après leur disparition de la région au XVII e siècle, les Amérindiens d’origine algonquienne furent les seuls à parcourir le Témiscouata. Les Micmacs y venaient occasionnellement, mais on ne peut pas dire que c’était leur territoire de chasse. Non, le Témiscouata était plutôt le territoire des Malécites, ou si vous aimez mieux, des Madawaski ou des Etchemins. Madawaski était le nom que leur donnait Guillaume de Rosier, en 1699. Etchemin est le nom que leur a donné le père Biard, jésuite, en 1611. Les Etchemins habitaient principalement la côte atlantique du Maine, où ils pêchaient et ramassaient des coquillages, puis toute la région du fleuve Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, où ils faisaient la culture du maïs, puis la région du Témiscouata jusqu’au fleuve Saint-laurent, sur les battures de Cacouna et de Kamouraska, où ils venaient pêcher et chasser le béluga. Malgré que leur population n’ait jamais été nombreuse, selon la plupart des archéologues, ils se promenaient sur un territoire important de plus de 65 000 Km². Ils arrêtaient camper à Dégelis, à Pohénégamook qui veut justement dire «lieu de campement» en malécite, à Notre-Dame-du-Lac et à Madawaska sur la frontière du Québec-Nouveau-Brunswick. Ils quittaient les rives de l’Atlantique, à la fin de l’été, pour venir pêcher le corégone au filet, à l’embouchure de la rivière Touladi sur le lac Témiscouata. Ils en profitaient pour chasser l’orignal, le caribou des bois alors présent, le castor, le rat musqué, le porc-épic et l’ours, juste avant son hibernation. Tous ces animaux leur fournissaient viande et peaux pour leurs vêtements, leurs couvertures et leurs abris. Les nombreux phoques du Saint-Laurent leur donnaient de petites peaux douces pour leurs vêtements de bébés, entre autres.

J’ai déjà parlé des Malécites dans mon premier volume de même que de leur cuisine spécifique en me basant beaucoup sur les Malécites du Nouveau-Brunswick et sur les Passamaquoddies qui sont très proches d’eux par les coutumes et la langue. Comme je le disais alors, les Malécites contemporains n’ont pas de village (réserve) comme les autres nations amérindiennes du Québec. Ils habitent un peu partout dans le Bas-Saint-Laurent et au Nouveau-Brunswick. Mais leur présence, reconnue officiellement par le Gouvernement du Québec en 1985, est plus qu’évidente par les nombreux noms qu’ils ont laissés à la toponymie régionale et surtout dans les coutumes culinaires et artisanales des premiers colons francophones et anglophones de la région. Ma liste de recettes intègre d’ailleurs quelques plats malécites traditionnels.

On s’est souvent demandé d’où venaient les Malécites. Il est à peu près certain qu’ils appartenaient d’abord aux Waban Aki de la Côte atlantique, dont les ancêtres seraient partis, comme tous les Algonquiens, de la baie Géorgienne et du nord du lac Ontario, en s’éloignant de plus en plus de leur terre natale. Intégrés d’abord aux Micmacs, ils s’en seraient détachés, comme tous les autres groupes, en prenant racine à l’embouchure de l’une des rivières qui se jettent dans l’Atlantique. Ce sont les Acadiens qui les connurent, les premiers, au début du XVII e siècle.

Puis, les premiers trappeurs et les premiers missionnaires jésuites les rencontrèrent dans la région de Rivière-du-Loup. On voulut commercer avec eux et on se rendit compte rapidement qu’ils empruntaient un sentier forestier qui leur permettait d’atteindre l’Atlantique et l’Acadie, sans problème. Ce fut une révélation pour les Français de Québec et de Port-Royal que ce fameux sentier du Portage!  L’intendant Talon fit donc défricher un chemin de 3 pieds de large sur tout le circuit, en 1749,  pour éviter surtout le blocus naval que les Anglais voulaient faire en bouchant le fleuve Saint-Laurent. — Les Anglais se préparaient à conquérir le Canada. Dès 1754, des Acadiens qui sentaient la soupe chaude, commençaient à l’emprunter pour rejoindre Québec, sans trop se faire remarquer. En 1755, au moins 200 Acadiens fuirent leur pays par ce chemin, lors du «Grand Dérangement» comme on a appelé la déportation des Acadiens. L’un de mes ancêtres (Landry) était parmi eux. Évidemment, le sentier fonctionnait surtout l’hiver. On avait alors installé 3 postes de ravitaillement où l’on pouvait dormir et acheter des vivres : l’un à Rivière-du-Loup, l’autre au lac Témiscouata près de Cabano, un troisième au-dessus du portage lui-même. On y vendait la même chose que l’on vendait dans les postes de traite de la même époque. Les Malécites y venaient souvent échanger du gibier et du poisson frais pour de la farine de blé et des pois secs. La mélasse, le sel faisaient aussi parti des biens échangés. Les voyageurs pouvaient donc se débrouiller avec ces denrées en se faisant surtout des ragoûts de gibier, de la bannique et du poisson rôti sur le feu de camp. Et il y avait toujours de l’alcool à vendre!

Les Britanniques, après 1760, virent l’utilité stratégique de ce sentier. Ils le firent entretenir à partir de 1775 pour que ce soit plus facile de transporter le courrier de Québec à la Nouvelle-Angleterre. En 1781, les courriers transportaient à cheval, des sacs de malle de 100 à 130 livres, à tous les 15 jours pendant l’été, et à tous les mois, pendant l’hiver. Le gouverneur Haldimand décida de l’élargir à 12 pieds, lors de la Guerre de l’Indépendance américaine, pour être capable de communiquer facilement avec Halifax et de transporter une armée pour venir défendre la frontière canadienne, si jamais les Américains voulaient libérer la colonie canadienne du joug anglais. Mais une violente tempête de pluie démolit le chemin en «2 temps 3 mouvements». Drummond, le nouveau gouverneur, décida donc d’élargir le chemin à 20-22 pieds et d’installer des colons militaires tout le long du chemin pour que ceux-ci s’occupent d’entretenir le chemin et d’héberger les voyageurs et les courriers (ceux qui transportent la poste) chez eux. Le premier de ces colons-soldats s’appelait Philipp Long et vint s’établir au lac Témiscouata avec sa famille; il y resta de 1809 à 1828. Puis, on distribua les terres à d’autres soldats, à partir de 1814. Et en 1817, le gouvernement se chargea de construire, à intervalles réguliers, des maisons pour les familles des soldats. Ceux-ci appartenaient au 10 e Royal Veteran Battalion et ils étaient des vétérans de la guerre de l’Angleterre avec Napoléon Bonaparte, terminée à l’avantage de l’Angleterre, en 1812.  Les deux premiers à s’installer s’appelaient Higginbottom et Georges Law. Les lieux choisis étaient  la rivière Verte, la rivière Saint-François, la Petite-Fourche près du mont Citadelle, le lac Témiscouata, Dégelé, la rivière au Bouleau et la rivière à la Truite. Les soldats étaient payés pour leurs services et recevaient une allocation en nourriture pour héberger les gens. Mais cette allocation ne suffisait pas à nourrir la famille du militaire; il devait faire comme tout le monde de l’époque, se planter des céréales pour nourrir les animaux qu’ils élevaient et se faire un jardin. Les endroits choisis n’étaient pas du tout propices à la culture; le climat était froid et la terre pierreuse. En 1823, comme le major Eliott voulut faire le tour des 22 maisons qu’il avait fait construire, il s’aperçut qu’il n’y avait plus que 7-8 familles qui étaient demeurées sur place; les autres avaient tous fui on ne sait où, probablement aux États-Unis. Il voulut ramener d’autres soldats, mais il n’eut pas plus de succès. Par conséquent, les premiers résidents du Témiscouata furent tous des Britanniques. Comme c’est le gouvernement et l’armée anglaise qui les nourrissaient, j’ai cherché à étudier ce qu’on pouvait bien leur servir à cette époque. Voici donc le résumé de mes trouvailles. 

Le régime des soldats anglais ressemblait beaucoup à celui des classes laborieuses de l’Angleterre: lard salé ou bacon, farine de blé ou de seigle, orge pour la soupe, du gruau d’avoine pour le matin, des biscuits secs appelés biscuits matelot au Québec qu’on trempait dans son café, dans la soupe ou le ragoût fait sur le feu, dans l’âtre ou à l’extérieur. Comme protéine, on mangeait, du bœuf ou du mouton. Quand la viande était rare, on la remplaçait, soit par du petit gibier qu’on attrapait dans la campagne tout autour, comme du lièvre, de la perdrix ou du canard, soit par du poisson, si on était en saison. Sinon, on se rabattait sur la soupe aux pois, aux haricots secs ou aux gourganes séchées ou sur des coupes de viandes plus économiques comme la tête de mouton, les pattes de porc, le poisson salé ou fumé et le fromage cheddar. Tout cela était toujours accompagné de vin ou de bière et de galettes de bannock qu’on faisait cuire soi-même sur une plaque, au-dessus du feu. Lorsque les soldats étaient en campagne, ils avaient, en plus, dans leur petit sac en bandoulière, du sel, du poivre, des épices comme de la cannelle, du macis, de la muscade, du gingembre, des amandes et du sucre. Ils mettaient toujours, dans ce sac, leurs restes de fromage, de pain ou de repas précédent, si c’était possible. À titre d’exemple, voici le genre de repas qu’un soldat de l’époque pouvait se faire lorsqu’il travaillait à réparer un chemin, ou qu’il marchait vers une destination ou qu’il était en entraînement militaire. On se faisait un feu à plusieurs, puis on faisait chauffer de l’eau. Avec cette eau, on se faisait du café dans lequel on trempait, bouchée par bouchée, un peu de biscuit sec. Ou bien les soldats d’origine écossaise se faisaient toujours cuire du gruau d’avoine avec un peu de sucre et une pincée d’épices. Les repas du midi, comme on n’avait pas le temps de se faire un feu, on mangeait très souvent du pain avec du fromage. Le repas préféré du soir était le skillygallee. Ce plat consistait à faire un feu et à y faire cuire et fondre des tranches de bacon ou de lard salé. Pendant que ça cuisait, on faisait tremper dans de l’eau des biscuits secs. On les faisait cuire ensuite dans la graisse fondue en les défaisant avec une cuiller. Il arrivait qu’on ajoute à ce gras, du poisson salé ou fumé dessalé en partie auparavant. Et l’on accompagnait le tout de bière, d’alcool fort (gin, cognac) ou de vin. Si on n’avait pas de poêlon, on faisait cuire le bacon tranché sur des branches vertes au-dessus du feu et on les mangeait avec du pain et du fromage. Certains piquaient leur pain avec le bacon pour les cuire tous les deux en même temps sur la braise. Le pain absorbait une bonne partie du gras qui fondait. Quand on était en garnison, c’était toujours plus varié et élaboré. C’est là qu’on mangeait de la viande en rôti ou en bouilli avec des pommes de terre et des légumes de saison. L’hiver, on remplaçait les légumes par des cornichons. Mais la pomme de terre était toujours au rendez-vous. Lorsqu’on n’avait pas de bœuf, de mouton, de chèvre, de dinde, d’oie ou de poulet frais, on allait vers le bœuf salé ou le porc salé ou fumé (jambon et bacon). Les vieux soldats anglais déjeunaient tôt, vers 6 h du matin, avec de l’orge sucrée ou salé, cuit à l’eau au repas du soir précédent. Le gros repas de la journée était fait le midi lorsqu’on était en garnison et l’on mangeait vers 13 h, après avoir fait de l’entraînement physique, tout l’avant-midi. Le souper était pris vers 19 h et il était toujours plus léger qu’au dîner. Quand on était campé pour un bon moment au même endroit, l’intendance du régiment distribuait des casseroles et des poêlons, à des groupes d’une dizaine de soldats, afin qu’on puisse se faire une soupe-repas ou un ragoût. Si la cuisine de l’armée anglaise a d’abord été à l’honneur dans les familles des  soldats vétérans, établies tout le long du Chemin du Portage, elle le fut encore plus quand le Gouvernement canadien dut dépêcher son armée en 1839, à la frontière du Maine. Il y fit construire un fort à Cabano, au lac Témiscouata, et un autre au Dégelé. Plus de 300 soldats se sont retrouvés au Témiscouata de 1839 à 1842. Je vous résume ce qu’on a appelé la Guerre non sanglante de l’Aroostook.

Le blocus naval imposé à l’Angleterre par Napoléon, obligea celle-ci à devoir s’approvisionner en bois et en poisson ailleurs qu’en Europe de l’Est et du Nord. Elle se tourna donc vers ses colonies américaines. On commença donc à faire la coupe du bois dans les Provinces maritimes et au Québec. On avait besoin, entre autres, de bois de construction et de beaux grands pins pour faire des mats de bateaux, des édifices, etc. On fit cette coupe du bois, pas trop loin d’un cours d’eau, afin de pouvoir le transporter facilement, puis de le charger sur les grands voiliers trans-atlantiques. Vers 1830, on était rendu dans la région de l’Aroostook, près de la frontière sud du Témiscouata. Mais les Américains du Maine faisaient la même chose, au même endroit, de sorte que l’Angleterre, par le biais du Nouveau-Brunswick, contesta cet empiètement du territoire canadien par les Américains. Ces derniers revendiquaient le même territoire. Il fallut négocier fort pour s’entendre sur la frontière actuelle. Mais on est venu à deux cheveux de se faire la guerre. Les deux armées étaient situées l’une en face de l’autre et attendaient les ordres pour aller se battre. Nous en savons plus sur cet événement grâce, entre autres, à la correspondance du jeune docteur Landry, nommé médecin du régiment canadien. Celui-ci était né à Carleton dans la Baie-des-Chaleurs et poursuivait des études de médecine à Québec. Pour faire son stage, il décida de s’engager dans l’armée et partit donc en même temps que les 100 premiers soldats du 24 e régiment, pour le lac Témiscouata. On y construisit un premier fort qui s’appelle, aujourd’hui, le Fort Ingall. Le Dr Landry assista aux débuts de la construction et se chargea des soldats malades ou accidentés du coin. Lorsqu’on construisit un autre fort au Dégelé, il s’y rendit régulièrement pour faire la même chose. — Les 200 soldats du 11 e régiment arrivèrent la troisième semaine de novembre et furent répartis dans les deux forts. Dans ses lettres, le docteur Landry nous fait le résumé de ses activités de la journée et parfois de son organisation en cuisine. Je vous donne ici quelques extraits tirés de sa correspondance. M. Richard Belzile de la Société d’histoire et d’archéologie du Témiscouata, a bien voulu me la faire connaître. «J'ai dû en arrivant m'acheter une batterie de cuisine. Les officiers n'en sont point fournis par le Gouvernement. De plus, j'ai été dans la nécessité de m'acheter de la farine, quelque chose pour faire de la soupe, sucre, thé, assiettes, tasses, couteaux, etc. de sorte que me voilà déjà en ménage et je puis dire ma cuisine. (Hum!)»(6 août 1839) «Ton papa a été assez bon de s'informer quelles étaient mes occupations et si j'allais à la chasse. Quant à mes occupations tu pouvais lui dire en quoi elles consistent. Il n'en est pas ainsi de la chasse elle s'est beaucoup accrue depuis que je t'en ai parlé. Mon fusil me fournit presque assez de gibier pour Mr. Chapman et pour moi-même. J'ai déjà tué un porc-épic, plusieurs rats musqués et j'ai perdu le nombre des tourtes et des perdrix. J'ai failli aussi tuer un ours mais n'ayant que du petit plomb dans mes poches, je n'osai entrer en guerre avec lui qui paraissait ne pas avoir froid aux yeux. (…) «Rien de bien intéressant ici. C'est toujours monotone. Les tourtes s'en vont rapidement. Cependant, j'ai encore fait mon dîner avec quelques-unes que j'ai tuées hier. Les perdrix reviennent, je vais leur faire une guerre opiniâtre. Le poisson commence aussi à être en plus grande abondance, voici aussi les patates nouvelles. J'espère que le pire temps est passé et que maintenant on aura quelque chose pour servir de substitut au lard salé et au biscuit.» (1 octobre 1839) «J'ai déjà plusieurs gros poissons (comme des saumons) que je pourrais envoyer maintenant, si la saison permettait de les envoyer frais. Mais comme je voudrais vous les envoyer dans toute leur beauté, je vais attendre encore quelque temps. Je me suis arrangé avec Mr. Jones pour leur transport à Québec. Je tends actuellement un rets pour Mr. Chapman et en voilà quarante-trois que je prends depuis peu de jours. Je suis après faire un rets pour moi-même. J'en ai déjà quinze brasses de faites et doit en avoir cinquante. J'en fait huit brasses par jour. Tu vois que je vais plus vite que toi à faire de la dentelle. Et je vais plus vite de jour en jour» (1 novembre 1839) Ces extraits nous livrent en quelque sorte la monotonie de la ration quotidienne du soldat et le besoin qu’a le médecin de varier son menu en allant à la pêche ou à la chasse dans les environs. — C’était d’ailleurs le même cas pour les premiers colons du Témiscouata. Au début de son installation, le Dr Landry disposait de deux pièces dont l’une lui servait de cuisine. Comme il était le seul officier, il avait engagé la femme d’un soldat pour lui faire ses repas. Il raconte qu’il allait chercher ses pommes de terre chez des agriculteurs du Madawaska puisqu’il n’y avait presque personne d’établi au Lac Témiscouata.  Plus tard, l’ajout de jeunes officiers amena l’armée à leur donner un mess et un cuisinier. Voici un autre extrait qui raconte ce qu’on pouvait y manger : «Je ne crois pas t'avoir donné des nouvelles de notre mess. Nous déjeunons à 9  heures et dînons à 5 heures. Nous nous traitons comme il faut. Nous avons continuellement de la viande fraîche et tous les jours une oie ou une dinde. Après le dîner la nappe se lève et commence la bouteille. L'allouance est chacune deux verres d'eau-de-vie, avec l'eau chaude. Je pars toujours après le premier, c'est un marché que j'ai fait avec moi-même. Une des raisons qui m'enjoignent à agir ainsi, c'est qu'avec le second verre commence le jeu de cartes, and I cannot afford to lose. J'ai cependant joué deux fois et j'ai eu le bonheur de perdre 12/, ce qui m'a guéri.»(13 janvier 1840) Ce dernier extrait signale l’usage abondant de l’alcool, à l’époque. Le Dr Landry raconte que la moitié des problèmes qu’il traite sont dus à l’alcool, autant chez les soldats que chez les bûcherons des alentours où il est assez souvent appelé d’urgence pour soigner une entaille profonde due à une bataille violente ou à un accident causé par l’alcool. Le problème de l’alcool était si généralisé des deux côtés de la frontière qu’il conduisit les leaders religieux à prêcher la tempérance et à créer même la loi de la Prohibition du côté américain. On verra, plus loin,  que cette décision aura des conséquences, même sur le peuplement du Témiscouata. 

Les Franco-québécois commencent à quitter les terres surpeuplées du Bas-Saint-Laurent vers 1848. Certains vont s’établir sur les hautes terres derrière Rivière-du-Loup où vivent les Malécites, à Withworth, Viger, des Sauvages, etc. Les premiers colons de Saint-Honoré sont arrivés en 1838. Ils venaient de L’Islet, Rivière-Ouelle, Saint-André-de-Kamouraska, l’Île-Verte, Cacouna, etc. On se rapprochait du Témiscouata. Le peuplement du Témiscouata s’est fait, grosso modo, en 3 étapes. De 1850 à 1860, le gouvernement du Bas-Canada fit construire une route plus large et mieux entretenue jusqu’au lac Témiscouata : c’est ce qui déclencha la première vague de colonisation dans la partie centrale de la région, dans l’axe de Rivière-du-Loup-Edmunston. Quelques-uns vinrent rejoindre la dizaine de familles établies à Notre-Dame-du-Lac, fondé officiellement en 1869,  d’autres s’installèrent la même année, à Packington; ils ne venaient pas du Bas-Saint-Laurent mais plutôt du Madawaska (N.B.) et de l’Aroostook, au Maine. Par après, des colons du Bas-Saint-Laurent les rejoignirent. D’autres colons vinrent se bâtir près du Fort Ingall, à Cabano, où s’était implantée la famille d’Alexandre Fraser en 1823. C’est d’ailleurs là que s’ouvrirent les premiers chantiers de coupe du bois dans la région, en 1865. La Compagnie Fraser avait même fait venir une quarantaine de familles anglophones des Maritimes pour faire l’ouvrage spécialisée. Le village serait officialisé en 1898. Mais en 1858, 10 familles originaires de Rivière-du-Loup vivaient à Sainte-Rose-du-Dégelé, 21 à Notre-Dame-du-Lac, 9 à Saint-Louis-du-Ha! Ha! qui allait être fondé officiellement en 1873. En 1888, le train du Témiscouata arrivait en favorisant la croissance encore plus grande de cette région centrale. Saint-Eusèbe serait fondé en 1906. Il faut noter que la voie ferrée était construite par des ouvriers d’origine italienne. Le fait que ces derniers devaient en partie s’approvisionner dans les environs a certainement créé des liens et des influences réciproques. Mais il serait difficile de dire ce qui vient de cette époque dans la cuisine d’origine italienne du Témiscouata. Les macaronis étaient déjà connus depuis 1830 au Québec. On allait retrouver ces Italiens dans la construction de l’autre grand chemin de fer du Témiscouata, entre 1908 et 1913. Ce train, appelé le Transcontinental, allait donner son nom à cette deuxième sous-région du Témiscouata.

Ce nouveau train allait relancer le peuplement déjà commencé à la frontière sud-ouest du Témiscouata. Ce serait la deuxième vague de peuplement. Le premier colon établi à l’embouchure de la rivière Bleue, est l’Américain John Morrison en 1858, aussitôt suivi de Joseph Nadeau et d’autres squatters américains. Plus tard, des Franco-américains de religion baptiste se joindraient à eux. En 1866, l’Irlandais Tom Fox et son beau-frère Ignace Nadeau y construisaient leur maison familiale près du lac Pohénégamook. Et des Acadiens du Madawaska s’ajoutaient aux premiers colons de Rivière-Bleue et des Étroits (Saint-Marc-du-Lac-Long). En 1874, Saint-Éleuthère était fondé, au bord du grand lac Pohénégamook. Le gros des colons de cette région viendraient du Bas-Saint-Laurent à partir de 1914. Les autres villages comme Sully, Estcourt profiteraient de la campagne de retour à la terre prôné par le gouvernement du Québec dans les années 30. Les colons arriveraient de partout, aussi bien de Kamouraska, que de Montréal, de Beauce et du Nouveau-Brunswick acadien.

Cette campagne de retour à la terre (Plan Vautrin) allait fonder la troisième sous-région du Témiscouata, à l’est du lac Témiscouata, dans l’ancienne seigneurie de Madawaska. Déjà, des gens originaires de Sainte-Anne-de-la-Pocatière,  avaient traversé, en face de Notre-Dame-Du-Lac, de l’autre côté du lac Témiscouata, pour aller cultiver la terre et bûcher du très beau bois. Leur nouveau village serait officialisé en 1923 sous le nom de Saint-Juste-du-Lac. En 1931, le village annexerait un groupe de colons installés aux Lots-Renversés. En 1920, un village bâti sur un site micmac, à la frontière sud de la Matapédia, allait ouvrir sous le nom de Squatec. Situé dans un magnifique endroit, à l’abri des Appalaches escarpées, au sud de Trois-Pistoles, les gens de ce village y développeraient l’agriculture et la forêt d’une façon assez équilibrée. Mais ce sont les années 30 qui révolutionneraient l’expansion naturelle de la région. Il faut rappeler, ici, que le plan Vautrin avait été institué pour 2 raisons. La crise économique provoquée par l’effondrement de la Bourse de New-York, en 1929, avait créé une pauvreté incroyable chez les cultivateurs et surtout, chez les ouvriers des villes. C’est pourquoi le gouvernement avait instauré un programme généreux de subvention pour ceux qui voulaient s’établir sur une terre. Beaucoup de gens voulurent profiter de ce plan et partirent ouvrir des villages un peu partout dans la forêt québécoise. Le Témiscouata connut un essor important de sa population avec l’arrivée de ces gens : la plupart étaient plus intéressés à couper du bois sur leur terre qu’à ensemencer du blé. On se faisait un jardin et on élevait quelques animaux pour sa survie, mais on n’était pas vraiment intéressé à faire de l’agriculture. Beaucoup de gens profitaient des subsides pendant qu’ils bûchaient leur terre, puis l’abandonnaient pour en bûcher une autre ailleurs, en cherchant la même aide gouvernementale. L’ouverture de ces nombreux villages agro-forestiers créaient des besoins de route que le gouvernement devait entretenir à coup de grands frais puisque presque la moitié de la population masculine travaillait à l’entretien de ces routes. Les villages de Lejeune fondé par des chômeurs montréalais en1930, Auclair fondé par des gens de Thedford-Mines en 1931, Lac-des-Aigles et Biencourt peuplés en 1931  par des gens venus des plus vieux villages du Témiscouata, connaîtraient des débuts difficiles avec une terre ingrate à cultiver, des feux de forêt, l’isolement, etc. Je vous cite ici un article tiré de la revue d’histoire régionale Le Témiscouata, rédigé par Mme Céline Grégoire-Thibeault, qui peut en témoigner : «On travaillait le sol, on semait un peu de tout mais ça ne suffisait pas pour nourrir une maisonnée à l’année longue. L’automne arrivé, plus d’un homme partait pour les chantiers, chez Fraser, en Ontario, à La Tuque ou ailleurs. D’autres travaillaient à la construction des chemins, allaient draver et tous se faisaient chasseurs pour assurer leur subsistance. Mais on ne travaillait pas tout le temps: presque à tous les dimanches soirs, il se tenait des “veillées”. On dansait des quadrilles, la gigue simple, on chantait. Le temps des Fêtes s’étirait sur une longue période. Une veillée à une place, une “veillée” à l’autre avec de la bagosse comme moyen de se recréer. Bien populaire que cet élixir appelé plus communément “ bière à bras” qui contribuait à faire oublier les préoccupations du temps.» Gagner sa vie et faire vivre sa famille étaient vraiment les préoccupations principales de ces gens. On était bûcheron en hiver, draveur au printemps, scieur en été. Il ne restait pas beaucoup de temps pour cultiver, surtout quand il fallait s’exiler pour tout faire ces métiers. On devait coucher dans des campes, manger dans des cook houses, la cuisine de François, Lorenza et Annette comme au moulin de Paul Bégin, à Lots-Renversés, en 1932. 

En résumé, le Témiscouata comptait 14 000 habitants en 1921, alors qu’il en comptait 4 000 en 1891 et 28 175 en 1951. L’augmentation de la population crut jusqu’en 1961 pour fléchir de plus en plus, depuis ce temps-là. L’industrie forestière en déroute, l’agriculture de subsistance terminée, l’exode rural vers la Côte-nord, puis vers les villes de Québec et de Montréal, font en sorte que la population, en 2000, ne dépassait pas les 20 000 résidents. La très grande majorité se considérait comme francophone. En 1951, sur 28 175 personnes, 274 se déclaraient d’origine britannique, 14 d’origine allemande, 7 d’origine italienne et quelques-uns d’origine malécite. 

Ses activités forestières et l’alimentation

Cette présence malécite me rappelle que la première activité économique de la région fut la traite des fourrures. Les Etchemins, ancêtres des Malécites, chassaient les animaux à fourrure à certaines périodes de l’année, comme le raconte le Père Biard dans sa Relation de 1611. « En ce mesme mois de février et jusqu’à la my-mars, est la grande chasse des castors, loutres, orignacs, ours -qui sont fort bons- et des caribous, animal moitié asne, moitié cerf.» (…) «En octobre et novembre est la seconde chasse des castors et des eslans.» Au XIX e siècle, les Malécites faisaient des ouvrages d’artisanat qu’ils vendaient aux touristes de Kamouraska ou de Cacouna, pendant l’été. Ces ouvrages étaient d’ailleurs tellement devenus à la mode que même des Franco-Québécoises s’y étaient mises en 1839. Le Dr Landry, dont nous avons parlé plus haut, recevait des commandes de la part des amies de sa fiancée, pour des poils d’orignal ou de porc-épic de même que pour des peaux de martre, plutôt rares à l’époque. Ce dernier se les procurait auprès des Malécites de la région. Ces objets étaient décoratifs et se plaçaient sur des meubles, comme des bibelots. Ils vendaient aussi beaucoup de gibier aux Franco-québécois fortunés qui n’avaient pas le temps ni la compétence d’aller chasser en forêt. Cela n’était pas encore considéré comme de la contrebande!

La seconde activité économique importante générée par la forêt du Témiscouata fut évidemment celle des chantiers et des scieries. On a d’abord commencé à bûcher le pin blanc comme dans l’Outaouais et le Saguenay. Les premiers chantiers avaient commencé au Nouveau Brunswick en 1791 pour fournir les besoins de la marine anglaise : ce qui avait permis de former des gens compétents dans le domaine, comme on l’a vu plus haut à Cabano. Ceux du Témiscouata avaient ouvert près du lac Témiscouata en 1865. Voici les témoignages de Messieurs Albert Saint-Amant, Xavier Saint-Pierre et Omérile Saint-Pierre de Notre-Dame-du-Lac qui témoignent de cette époque. Notez ce qu’ils disent de la nourriture qu’on y servait. «À la drave, on se prenait un éclat de soupe aux pois congelée qu’on faisait chauffer dans une chaudière sur le feu avec du pain. On avait des beans 4 fois par jour. Comme lunch (collation) on apportait des galettes dans nos poches. Entre 15 et 18 ans, la pinte de lait coûtait 0.08 $.» (…) «Le cook nous faisait de la viande pi des patates et le soir il mettait des beans dans la braise.» (…) Le cook faisait cuire, la nuit, la viande et les beans en même temps.» (M. X. Saint-Pierre) «En 1903, on montait dans le bois l’automne. Dans le camp, on couchait à terre sur du sapin ou en haut, sur des rondins.» «On mangeait des beans le matin, le midi, c’était du lard américain avec un bunch de pain, pas de mélasse. Le soir, c’était de la morue (salée) rôtie dans la graisse avec des pétaques (pommes de terre), de la viande (boeuf), des côtelettes (porc), du corned beef (boeuf salé) et du buffalo salé (bison salé)." «Le printemps, à la drave, on n’avait pas de sel, pas de mélasse, pas de savon. Le soir on mangeait des patates (pommes de terre) bouillies avec du lard ou avec de la viande. On mangeait de la mélasse, des tartes, du beurre avec du pain.» (M. O. Saint-Pierre)

L’industrie forestière, avec ses camps de bûcherons, sa drave et ses scieries fit vivre des villages entiers, à un moment donné : ce fut le cas spécialement pour les villages à l’est du lac Témiscouata et ceux du Transcontinental. 220 journaliers travaillaient dans les scieries du Transcontinental, à un moment donné. Saint-Éleuthère à lui seul possédait 13 moulins à scie en 1913, Sully en avait 10, Saint-Elzéar en avait 5 dont 2 importants.  Les Étroits (Saint-Marc-du-Lac-Long) possédait les 2 plus gros moulins à scie du Témiscouata; une centaine d’hommes, venant de partout, y travaillaient de sorte qu’on devait les coucher dans des dortoirs et les nourrir dans une cafétéria d’une centaine de places. Les activités de coupe de bois, en particulier celles qui étaient suivies de désouchage par le feu pour faire de la terre, provoquaient des feux de forêt fréquents qui pouvaient ruiner des villages complets. Un feu important brûla d’ailleurs une grande partie de la région en 1923. À partir des années 50, l’industrie du bois se transforma et se diversifia encore plus. On scia davantage du bois franc pour faire des manches de toutes sortes (à balai, à pelle, à vadrouille, à ballon-balai, à lavette, des barreaux d’échelle, des chevilles de chemin de fer, etc.) et l’on a construit des fours pour faire du charbon de bois avec les découpes du bois. On continua d’exploiter le cèdre, on ajouta les moulures décoratives en pin tout en continuant de faire du bois de palette. De 1850 à 1950, 3 usines de sciage liées à la famille Fraser, occupèrent plus de la moitié de la population du Témiscouata et 8 autres scieries plus petites en occupèrent un autre 25%. En 1991, cette industrie arrivait en troisième au niveau de l’emploi, dans la région. Quand on sait que la forêt occupe toujours 87% de la surface de la région, on ne peut vraiment pas passer à côté!

S’ajoute à cela, aujourd’hui, une activité directement liée à l’alimentation, celle de la chasse et de la pêche. Presque tous les villages agro-forestiers accueillent des adeptes de ce sport dans leurs limites territoriales. L’étude du garde-manger vous en dira plus sur la question des denrées sauvages du Témiscouata.

Ses garde-manger

Le garde-manger sauvage

La forêt mixte du Témiscouata nous permet d’y trouver la flore et la faune de la forêt boréale, au nord, et de la forêt de feuillus, au sud. Les gens de la région, étant loin du littoral, ont trouvé, près d’eux, tout le poisson qu’ils voulaient pour les jours maigres : touladi, corégone,  «pointu» qui est un corégone qui demeure petit, truite mouchetée, ouananiche, perchaude, carpe (meunier) et lotte, en hiver. Depuis quelques années, on trouve aussi de la truite arc-en-ciel ensemencée. Comme me l’a raconté une dame de Cabano, ceux qui habitaient pas trop loin de Rivière-du-Loup, de Kamouraska ou de Trois-Pistoles allaient se chercher de l’anguille, du hareng, du saumon et même de la morue pour l’hiver. «Ils mettaient ça dans le sel dans des quarts». Mme Céline Grégoire qui raconte l’histoire de Saint-Juste-du-Lac, sur la rive nord du lac Témiscouata, parle en ces termes des poissons de la fin du XIX e siècle : «on distingue à quelques milles devant soi, à gauche, dans la direction de la partie supérieure du lac, une habitation d’une assez vaste apparence, au milieu des champs découverts. C’est la ferme solitaire de Monsieur Lévite Thériault, à l’embouchure de la rivière “Touladi” le plus considérable des cours d’eau qui se jette dans le lac Témiscouata. Cette rivière est étonnamment poissonneuse; on y prend en quantité du hareng d’eau douce, du touladi, espèce de truite grise qui pèse de cinq à six livres, et du “pointu”, (corégone) autre variété de truite généralement inconnue ailleurs...» Le «hareng d’eau douce» dont elle parle est le nom québécois que l’on donne à la laquaiche. On l’appelle aussi «gros yeux». C’est un poisson qui était apprécié des Amérindiens parce qu’ils ne se préoccupaient pas des nombreuses arêtes que ce poisson a, surtout qu’ils le mangeaient bouilli et pouvaient facilement en retirer la chair. Mais il est quand même étonnant de trouver de la laquaiche dans cette partie du Québec alors qu’aujourd’hui, on en trouve plutôt dans l’ouest, comme au Témiscamingue. La truite mouchetée, le touladi, le doré et plus rarement la ouananiche, sont les poissons le plus pêchés dans la majorité des familles. S’ajoutent à ces derniers la queue d’anguille, nom local pour la loche pêchée en hiver, et la perchaude bien appréciée des descendants des Malécites de la région.

Cette nomenclature ne fait que démontrer la richesse alimentaire de la forêt du Témiscouata. Je ne voudrais pas oublier de vous mentionner le fait qu'on pêche le corégone depuis au moins 150 ans sur le lac Témiscouata. On le ramasse particulièrement en octobre et en novembre à l'embouchure de la rivière Touladi. Autrefois, et ce jusqu'en 1991, on le ramassait au filet. On a aboli le filet à ce moment-là pour protéger le touladi qu'on ramassait en même temps et dont la survie était en danger. Mais on peut toujours continuer de prendre du pointu avec une épuisette. On a droit à 72 corégones ou pointus par jour. Ce poisson est vraiment typique de la cuisine familiale du Témiscouata et devrait davantage être servi dans les foyers. En 1903, une dizaine de familles de Cabano vivaient exclusivement de la pêche sur le lac Témiscouata. Le flottage du bois et le rejet du bran de scie dans l'eau fit diminuer la ressource de façon importante de sorte que le commerce arrêta de lui-même. D'autre part, on peut aussi pêcher la perchaude au lac Pohénégamook, et la truite mouchetée sous la glace au lac des Aigles. Au Zec Owen, 32 lacs contiennent de la truite mouchetée et 2 du touladi. Je voudrais en terminant vous donner des témoignages de pêcheurs anglophones, pensionnaires de l'Hôtel Cloutier du lac Témiscouata, en 1869 : «8 douzaines de truites en 4 heures», «160 truites en 2 heures» , «308 livres de touladis et truites en 3 jours»…

Assez rêvé! Passons à une autre richesse de la forêt du Témiscouata : le gibier. Autrefois, les chasseurs ne manquaient pas d’orignal, de chevreuil (cerf de Virginie) et les Métis malécites et franco-québécois ne dédaignaient pas l’ours noir, la marmotte, le castor, le porc-épic, le rat musqué et le lynx roux. Et c’est sans parler aussi de la sauvagine de Dégelis qu’on transformait en ragoût. À la montagne à Fourneau (mont Lennox), il y avait un gros ravage de chevreuils  et les gens le savaient. Aujourd’hui, les gens de Pohénégamook installent même des mangeoires autour de leurs propriétés pour attirer les chevreuils, tout l’hiver. Au début de l’ouverture des villages forestiers, le petit et gros gibier constituaient au moins la moitié de la viande consommée dans les foyers. On n’avait pas le choix. Il faut penser que pour élever du bœuf, des vaches et des porcs, ça prenait des céréales comme de l’orge et de l’avoine. Il fallait labourer, en semer et en récolter. Comme on n’avait pas le temps de faire cela avec tout le bois à bûcher et à scier, on se rabattait souvent sur le gibier qu’on pouvait trouver facilement, étant donné qu’on passait une bonne partie de l’année dans le bois. Même les enfants s’impliquaient dans la petite chasse en allant tendre des collets pour prendre du lièvre. Notre liste de recettes relève plusieurs recettes qui datent de cette époque. 

La flore laurentienne de la région a été décrite par le Frère Marie-Victorin lui-même lors d’une visite sur les rives du lac Témiscouata. Les petits fruits sauvages abondent au Témiscouata. Je pense ici aux fameuses petites fraises des champs de Saint-Elzéar! Mais c’est surtout l’érable dont il faut parler maintenant, car en plus d’être une denrée sauvage familiale, il est en train de devenir un moteur important de l’économie locale. En effet, depuis quelques années, on se rend de plus en plus compte que le sirop d'érable représente une richesse aussi grande que le bois d'érable au point que les élus de la MRC ont dû faire faire, en 1997, une étude par la firme Tecsult sur ce qui serait le plus avantageux d'exploiter pour le bénéfice économique et écologique de la région. Le potentiel en érablières est l'un des plus importants du Québec! Avec le réchauffement du climat, les érablières situées plus au nord et plus à l'est du Québec, ont un bel avenir. Actuellement, les propriétaires terriens essaient d'exploiter la ressource au maximum des débouchés sur le marché mais il faut vraiment bien gérer la ressource pour ne pas inonder le marché et abaisser les prix au point de rendre l'activité non rentable. C'est une question d'équilibre. On est en train, depuis quelques années, d'ajouter aux érablières traditionnelles dans lesquelles on se retrouve avec joie, le printemps, une exploitation commerciale du sirop d'érable sur les terres publiques. 6 694 hectares sont actuellement exploitées mais il y en a un bon autre 5 000 de possibles. Les propriétaires privés, quant à eux, en exploitent aussi plus de 5 000 hectares. Le Témiscouata compte 140 érablières dont 80 ont près de 5 000 entailles par érablière, 30 en ont de 5 000 à 10 000, 15 en ont de 10 000 à 20 000 et 15 en ont plus que 20 000. 80 % du sirop est mis en baril pour l'exportation et le 20 % qui reste est consommé localement. Cette activité économique apportait 3.6 millions de dollars en 2006. Ce n'est pas négligeable! Voyez, de plus, les chiffres impressionnant suivants : En 1985, on avait 210 000 érables d'entaillés, en 1991, 900 000, en 1996, 1 861 070 : ce qui ne représentait alors que 22% du potentiel d'entailles au Témiscouata! Et l'on pouvait aller manger de la tire sur la neige dans une dizaine de cabanes à sucre publiques. Sur les terres publiques, et de plus en plus chez les propriétés privées, la sève d'érable est ramassée, de façon très moderne, par osmose inversée. Le sirop coule par le biais d'un réseau tubulaire et s'achemine à la bouilloire automatiquement sans que l'homme n'intervienne beaucoup. Il est mis en baril et transporté en entrepôt. À partir de là, on l'exporte à l'étranger en vrac ou à des entreprises canadiennes qui le mettent dans des contenants plus petits avec identification canadienne. Mais les différences subtiles que perçoivent bien les Québécois connaisseurs disparaissent complètement.  Autrefois, chaque famille avait ses préférences : on aimait le sirop du milieu de la cueillette pour sa clarté : c'est lui qu'on choisissait pour accompagner les crêpes. Et l'on gardait celui de la fin pour faire les grands-pères, les poudings, la tire ou le sucre pour les beurrées de crème! On aimait le sirop de telle érablière plutôt que telle autre à cause de la terre dans laquelle l'érable poussait. Chaque terre donne son goût, un peu comme le vin. D'où la fierté pour l'entailleur de faire le meilleur sirop d'érable du coin! Cette tradition se poursuit heureusement : on peut encore aller acheter son sirop chez l'habitant à Lejeune, Saint-Athanase, Saint-Eusèbe, Saint-Pierre-de-Lamy, et ce dernier peut aussi ajouter de la valeur à son produit en faisant de l'alcool d'érable comme à Auclair, des bonbons au sucre d'érable comme à Packington, de la gelée, du vinaigre et que sais-je encore. Il ne faut pas perdre cette partie importante de notre savoir-faire. Passons maintenant au second garde-manger.

Le garde-manger de la ferme.

L’agriculture du début en était une de subsistance, comme dans toutes les régions agro-forestières du Québec. Les gens se faisaient des jardins, élevaient une vache, 2 porcs et une vingtaine de poules pour se nourrir et c’était tout pour la majorité des familles. Quelques-unes cependant bénéficiaient d’une terre plus productive et pouvaient vivre complètement de l’agriculture. Particulièrement ceux qui avaient plusieurs vaches pour le lait, des veaux, des porcs, des bœufs, de la volaille et du mouton. Ils vivaient avec la vente des produits fermiers. Notre-Dame-du-Lac vit depuis longtemps des produits de la ferme; dès 1896, on ouvrait une fromagerie sur place. Dans les années 30, il y avait une beurrerie à Sainte-Rose-du-Dégelé qui produisait 55 000 livres de beurre par année. À Saint-Éleuthère, les cultivateurs allaient porter leur lait à la fromagerie (1920). À Sully, le curé Drapeau avait fondé une coop qui avait sa beurrerie (1937) et son gros poulailler. Packington avait construit une fromagerie en 1928 qu’il transforma en beurrerie en 1953. Lac-des-Aigles connut un certain succès avec son industrie laitière; la Coop avait ouvert une beurrerie qui produisait 110 000 livres de beurre par année au moment de sa fermeture en 1973. Et la région du Transcontinental était réputée pour ses beurreries. Au milieu des années 50, on commença à pratiquer une agriculture spécialisée. Quelques villages ont encore chez eux des fermes laitières très bien organisées, beaucoup plus grandes qu’auparavant et dont les jeunes propriétaires ont même faite des études collégiales en agriculture. Il y a une bonne relève agricole au Témiscouata. Aujourd’hui, on trouve aussi toutes sortes de fermes d’élevage : bovins de boucherie, agneaux, porcs, œufs, faisans, perdrix bartavelles, cailles, pintades, cerfs de Virginie, bisons, lapins, autruches, émeus, abeilles, truites diverses en pisciculture. On pratique aussi encore la culture traditionnelle de l’avoine, de l’orge, du seigle, du méteil (grains mélangés avec légumineuses) et même un peu de blé pour les boulangeries artisanales. Les cultures potagères sont aussi présentes au Témiscouata. Plusieurs villages ont expérimenté des cultures de légumes à la grande échelle, comme Rivière-Bleue avec ses asperges, Packington avec ses crucifères qu’il vendait à McKain au Nouveau-Brunswick (choux, choux-fleurs, choux de Bruxelles, brocolis, rutabagas), Lejeune avec ses pommes de terre, Saint-Eusèbe avec ses tomates cultivées en serres hydroponiques, et auparavant Saint-Honoré avec ses champs de pois, de sarrasin, de blé et de rabioles (petits navets blancs). Plusieurs petits producteurs font de la culture de fraises, de framboises, de tomates et concombres en serre, de champignons, de pommes de terre. On a même quelques vergers de pommes et de prunes. Voici en terminant le témoignage de Mme Saint-Amant de Notre-Dame-du-Lac  qui raconte les jardins que ses parents faisaient en 1939 : «On cultivait des fraises sur notre ferme  en 1939. Mon père avait acheté 200 plants de fraises de l’agronome et il les cultivait d’une année à l’autre en pépinière. Il en vendait dans 11 paroisses autour. Il en plantait 12 000 plants par année. On les labourait en automne, et on hersait 2 fois l’automne pour enlever la mauvaise herbe.» «On plantait aussi des carottes, du navet, des “palettes de fèves” (haricots), du blé d’Inde. C’est le curé qui nous fournissait les graines et on lui donnait des légumes après.» Un autre témoignage de Mlle Hélène Migneault de Notre-Dame-du-Lac nous parle plus concrètement du garde-manger de la ferme familiale. Elle donne sa technique pour faire du savon, puis des conserves. «On prend 10 livres de fraises et 10 livres de sucre et on les laisse toute la nuit. On fait bouillir 10 m et on laisse refroidir. On fait la même chose avec les framboises.» (…) «On mettait de 175 à 180 livres de porc et de boeuf en conserve. On faisait des cretons et du boudin dans une casserole avec de la panne et du sel. On pouvait en conserver 15 jours sur la glacière pendant l’été. On faisait du ketchup aux tomates. On faisait 12 pains par semaine» (…) «Dans le jardin, on plantait du concombre, du maïs, du navet, des carottes, des betteraves, des pommes de terre, de la laitue, des “palettes de fèves”, du chou, des tomates. On mettait des tomates et des fèves en conserve mais on mettait le reste dans la cave.» Et elle termine son témoignage en expliquant comment elle faisait le beurre de la maison. Évidemment, ce savoir-faire fait partie du passé! 

J’ai heureusement vu des groupes de femmes se réunir dans des cuisines collectives (Cabano, Lac-des-Aigles et Dégelis) pour se réapproprier les savoirs culinaires d’antan avec une nouvelle préoccupation santé et une adaptation à la vie moderne super-occupée. Tout cela est bien prometteur pour la sauvegarde du patrimoine culinaire du Témiscouata. Passons maintenant aux recettes qui vont illustrer les différentes périodes de l’histoire culinaire régionale de même que ses ethnies fondatrices.

Ses recettes

La cuisine du Témiscouata illustre parfaitement la cuisine québécoise de base : elle est un lieu de rencontres culturelles;  elle est le résultat de la rencontre des cuisines d’origine française comme celle de la région de la Côte-du-Sud et de l’Acadie du Madawaska, celles d’origine britanniques apportés par les soldats anglais, les immigrants du Nouveau-Brunswick dont une partie était de souche allemande, et les immigrants du Maine. Enfin, elle recèle plusieurs recettes métis issues des cultures malécite et micmac  environnantes. On note aussi quelques apports de denrées voisines de la Matapédia comme le saumon de même que quelques recettes originales appartenant à quelques immigrants aussi établis dans les régions voisines comme les Syriens et les Suédois. Mon échantillonnage est aussi très varié à cause des personnes d’origines diverses que j’ai eu la chance de rencontrer dans la région. Un grand merci à tous ces gens qui reconnaîtront leurs recettes.

Code d’identification

AB - Abénaquis

AC - Acadien

AL - Allemand et autrichien

AN - Anglais

BR - Britannique, toutes origines confondues

EC - Écossais

FR - Franco-québécois

JR – Îles anglo-normandes

ML - Malécite

NA - Nouvelle-Angleterre

SW - Suédois

Les spécialités du déjeuner

Biscuits matelots (hardtack) des soldats - BR

Confiture de fraises, rhubarbe et sucre d’érable

Confiture de merises et fraises - FR

Confiture de petits fruits sauvages mélangés - FR

Crêpe à la neige des années 1880 - FR

Fèves au lard au sirop d’érable - AB

Fèves au lard dans le trou du feu des Malécites - ML

Gelée d’atocas - NA

Gelée de groseilles - BR

Miel de pissenlit - FR

Miel de roses sauvages et de trèfles blancs - FR

Muffins aux bleuets - BR

Pain à la farine de maïs aux bleuets frais - NA

Plug avec graisse d’ours et sucre d’érable - ML

 

Les entrées, collations et petits repas

Bouchées de touladi ou de truite enrobées de blancs d’oeufs assaisonnés et de biscuits soda écrasés, frits en grande friture

Canapés de fromage à tartiner au bacon - NA

Coeurs de quenouilles en conserve d’eau salée

Coquilles (coques d’eau douce) bouillies sur du pain grillé beurré - FR

Corégone fumée en collation - ML

Crêpes farcies aux champignons sauvages- FR

Écrevisses du Lac Jerry bouillis avec pain de ménage et beurre - FR

Galettes à la farine de quenouille 

Goulash (mélange de bleuets et de sucre d’érable cuits avec un peu d’eau dans un grand chaudron jusqu’au temps que le tout forme une pâte épaisse semblable à du goudron, tartinable sur du pain. S’accompagne de gin De Kuyper - ML

Goulash de petites fraises. (cf goulash de bleuets) - ML

Monégan: bannique recouverte d’oignons frits, de perchaudes poêlées et recouverte de mayonnaise mélangée à de la relish - ML

Pissenlits frais ou congelés au lard salé - FR

Quiche aux têtes de violon - FR

Salade de truite au concombre et céleri à la mayonnaise - EC

Tendons (épaule d’orignal fumée, coupée en dés, salés et poivrés, et servis en amuse-bouche avec de l’alcool) - ML

Terrine de lièvre et de poitrine de porc aux herbes et cognac - FR

Têtes de violon frais ou congelés au lard salé - FR et ML

Touladi en gravlax (marinée à l’aneth, sel, sucre et poivre) -SW

Les soupes

Bouillon de poule aux pommes de terre en dés et poulette grasse ou jeunes feuilles de fougères en train de se dérouler 

Crème de tomate maison aux herbes salées - FR

Potage de pommes de terre et pourpier sauvage, épinards ou cresson

Soupe anglaise aux racines sauvages - AN

Soupe au saumon et au gruau avec de l’oignon sauvage (ail des bois) - MC

Soupe de pointu aux patates et au céleri avec sauce blanche légère - JR

Soupe écossaise au gruau et mauvaises herbes - EC

Velouté de poulet aux pleurotes et sarriette du jardin - FR

Les plats principaux

De la forêt

Les poissons

Boulettes de corégone à la purée, panées et poêlées au beurre - BR

Boulettes de truite mouchetée, panées au biscuits soda et poêlées au beurre - NA

Casserole de riz aux haricots verts, tomates, touladi et cheddar râpé

Casserole de truite pochée et parée avec carottes, ketchup et biscuits Ritz, Breton ou soda

Corégone ou pointu bouilli, défait et mélangé à de l’oignon revenu au beurre et nappé de lait chaud (mangé le soir pour aller mieux dormir) - ML

Croquettes de purée de pommes de terre, cornichons sucrés et touladi - BR

Filets de perchaude aux tomates et basilic, au four

Filets de perchaude farinés au sel de céleri et paprika, dorés, mis en béchamel et gratinés avec cheddar

Filets de touladi marinés à la cassonade, sauce soya et moutarde forte, grillés sur barbecue

Gratin de nouilles au saumon ou truite mouchetée et fromage cheddar

Linguine au touladi, crème, thym, asperges, poivron rouge et parmesan

Pain de touladi à la chapelure, oeufs battus et lait chaud avec sauce blanche - FR

Pain de truite mouchetée avec pain déchiqueté, oeufs et mayonnaise - FR

Pâté à la ouananiche en purée de pommes de terre - BR

Pâté à la truite (genre pâté au saumon) servi avec mayonnaise moutarde relish

Perchaudes farinées au sarrasin et frites dans le beurre - AC et ML

Pique-nique à la petite truite, pommes de terre dans la braise et salade à la crème - FR et ML

Pizza à la truite mouchetée, crème de champignons, champignons et mozzarella

Queue d’anguille (loche) pochée ou rôtie au beurre - FR

Rouleau de purée de pommes de terre au pointubouilli - FR

Sauce au touladi et oignons à patates- ML et FR

Sauce blanche au pointu (corégone) aux herbes salées - FR

Touladi avec une sauce au citron (béchamel et mayonnaise)

Touladi entier au four, arrosé de vinaigre de vin rouge et de jus de citron - FR

Touladi farci au pain et cheddar ou fromage piquant au piment

Touladi farci aux biscuite Ritz et soda avec crème de tomate, crème de céleri

Touladi fourré aux oignons, enrobée de bacon au four, avec frites

Les oiseaux

Canard sauvage farci aux biscuits soda, riz, porc haché, carotte et céleri

Pain de perdrix cuite hachée avec bacon et veau haché 

Perdrix badigeonnées de muscade et moutarde sèche et rôties sur un lit de légumes - BR

Perdrix bardées de lard, farcies au porc et épices, entourées de carottes, petits oignons et chou en quartiers - FR

Perdrix fumées servies avec des grelots (petite pommes de terre) et des têtes de fougères (congelées)

Ragoût de volaille domestique ou sauvage épaissi à la farine de faîne (fruits du hêtre) - ML

Stew à la perdrix (bouillie, arrangée et intégrée à un mélange de carottes, pommes de terre et oignons en dés avec sarriette)

Le gibier

Boulettes d’orignal aux légumes en crème de tomate

Chevreuil ou porc à la mélasse avec pain de ménage

Cipaille au boeuf, lièvre et porc en alternance avec des carrés de pâte - FR et BR

Cipâte au lièvre, orignal et porc avec pommes de terre et céleri en dés et Bovril

Civet de lièvre et de tranches d’agneau dans l’épaule avec oignons et vin rouge

Flanc d’orignal bardé de lard salé, farci à la saucisse de porc et épices à volaille

Pain de chevreuil et porc hachés aux champignons - FR

Pâté acadien au lièvre et au porc - AC

Pâté de lièvre, canard sauvage et perdrix en sauce, entre deux abaisses - FR et BR

Ragoût de boeuf en cubes et lièvre au lard salé avec grands-pères - BR

Ragoût de chevreuil en cubes aux champignons (chanterelles), ail et marjolaine - FR

Ragoût de chevreuil, pattes de porc et poulet à la manière de Serge Deyglun

Ragoût de lièvre aux 3 épices (muscade, cannelle et clou de girofle) - FR

Ragoût de siffleux (marmotte), castor, lynx, rat musqué ou d’ours - ML

Rosbif de chevreuil à la sauce aux champignons de Paris ou sauvages - BR

Rôti de cuisseau de chevreuil mariné 2 jours avec sauce à la crème et gelée de groseilles - FR

Rôti de porc et chevreuil aux épices à steak

Rôti du dimanche au chevreuil, porc, bœuf, rondelles d’oignons et patates jaunes - FR

Saucisses maison de lièvre, chevreuil ou orignal et porc haché au sirop d’érable

Steak de chevreuil avec ragoût de tomates, poivrons verts, ail et sauce soya

De la ferme et du jardin

Coosh ou sauce à la poche (faite avec de la farine grillée et de la graisse de lard salé) - NA

Gratin de pommes de terre en alternance avec champignons de Paris ou sauvages et fromage suisse râpé

Pets de soeur aux restes de viande ou de farce et sauce tomate-champignons

Poulet glacé aux épices, moutarde et sirop d’érable - FR

Rôti de porc avec un petit morceau de corégone ou de touladi fumé - ML

Les desserts

Bananes à l’érable et au rhum, gratinées au four

Biscuits à l’érable - FR

Biscuits au citron à la confiture de bleuets - NA

Bourding  (sortes de beignets cuits à la cuillérée dans la grande friture)

Brioche au miel - FR

Carrés aux framboises et noix de coco

Choux à la crème au sucre d’érable du Témiscouata

Compote d’atocas et de pommes - SC

Flan de yogourt aux petites fraises  - FR

Galettes à la confiture de framboises - FR

Galettes aux bleuets

Gâteau frigidaire à la mousse aux bleuets

Gâteau renversé au sirop d’érable - NA

Gâteau streusel aux bleuets - AL

Meringue au sirop d’érable - FR

Pain au miel et ananas haché en conserve

Pain aux bananes et atocas

Petits choux au beurre d’érable - FR

Petits croissants aux noisettes trempés dans le chocolat

Plum Pudding aux atocas de grand-maman Harrison - EC

Pouding aux pommes à l’érable - NA

Shortcake aux framboises et aux bleuets servi chaud avec crème - NA

Slides à la confiture de groseilles

Sucre à la crème au sirop d’érable et aux noix - FR

Sucre d”érable à la crème - FR

Taffy à l’érable (Tire) - FR et NA

Tarte aux biscuits Graham, bleuets et crème fouettée - NA

Tarte aux bleuets - FR

Tarte aux framboises des champs de Bernadette

Tarte aux pommes et au miel avec tranche de fromage cheddar

Tarte aux raisins, sauce à l’érable

Tarte des chantiers aux oeufs et sirop d’érable - FR

Tartelettes à la confiture de framboises à la cannelle - FR

Tartelettes aux petits fruits sauvages - FR

Boissons

Bagosse aux petits fruits (ancêtre des coolers aux fruits) - FR

Boisson malécite d’autrefois aux atocas, gruau et sherry (XIX e s.) - ML

Chiquenaude au whisky et sirop d’érable

Cocktail de vin de cerises au Cream Soda et alcool pur

Sirop au vinaigre de framboises pour boisson rafraîchissante - FR

Vin de bleuets et framboises - FR

Vin de cerises à grappes - FR

Vin de pissenlits et citron - FR

Vin de salsepareille - FR