Les soupes aux huitres

Les soupes aux huitres ont été très populaires, chez nous, de la fin du XIXe siècle aux années 1950. Elles faisaient partie du menu d'hiver, dans plusieurs familles, comme le racontent plusieurs de mes témoins. On les faisait souvent en fin de soirée, comme lunch après une soirée de cartes ou une réunion familiale. On en faisait aussi lors des parties d'huitres organisées par les compagnies forestières ou minières. Les gens qui n'étaient pas familiers avec les huitres sur écale acceptaient la plupart du temps de gouter aux soupes ou aux beignets d'huitres. Mon enquête révèle que les Québécois d'origine loyaliste ou américaine en étaient particulièrement friands de même que ceux d'origine anglaise ou écossaise. Les Gaspésiens, en particulier les Micmacs de Listuguj, les appréciaient beaucoup. Certaines familles les mangent encore fraiches, avec des herbes hachées et du vinaigre, à la vieille façon normande, en compagnie d'oeufs durs en tranches. La plupart de nos recettes d'huitres remontent au Moyen Âge et nous ont été léguées par les familles d'origine britannique ayant vécu pas très loin de la Côte de la Nouvelle-Angleterre et par les familles de la Baie des Chaleurs ou des iles de la Madeleine où les huitres américaines (crassostrea virginica) faisaient partie du décor. Malheureusement cette huitre fut attaquée par une maladie grave dans les années 60 et disparut de nos côtes. Les huitres qu'on mange, à l'heure actuelle, proviennent d'élevages contrôlés aux iles de la Madeleine, et surtout au Nouveau-Brunswick et à l'Ile du Prince-Édouard.

 La tradition française, plus particulièrement normande, prépare les soupes aux huitres avec simplement du lait et de la muscade. La tradition britannique les prépare aussi avec un bouillon de viande comme le veau ou la dinde qu'on épaissit avec de la chapelure. Cette façon d'associer les huitres à la viande remonte à Apicius, donc à l'époque de l'Empire romain. Jusqu'au XIXe siècle, on farcissait des viandes avec des huitres. Mère Caron, en 1840, propose un civet de lièvre aux huitres. Le bouillon de viande aux huitres était donc une coutume tout à fait normale pour l'époque. Mais dans les familles franco-québécoises familières avec l'huitre, on la préférait avec du lait en compagnie d'une herbe ou d'une épice comme les recettes de cette collection le démontrent.

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